Stress hydrique : quelles solutions pour y faire face ?
Aujourd’hui, un tiers des habitants de notre planète n’a pas accès à l’eau potable et les projections montrent que d’ici 2050, plus de la moitié de la population vivra en situation de stress hydrique. La rareté de l’eau en termes d’approvisionnement en eau potable, ainsi que pour l’agriculture, les industries et les municipalités, n’est plus seulement le problème des pays en développement ou de certaines régions arides, mais un véritable enjeu à adresser rapidement dans l’intérêt de tous. Dans cet article, Alcimed explore deux solutions technologiques prometteuses pour lutter contre les pénuries d’eau et décrypte les obstacles qui entravent leur développement en Europe.
Quelles sont les technologies disponibles pour augmenter l’approvisionnement en eau ?
Le dessalement et la réutilisation des eaux usées sont aujourd’hui deux alternatives fiables pour prévenir les pénuries d’eau et accéder à des sources d’eau non conventionnelles.
Le dessalement de l’eau de mer est le processus par lequel les sels minéraux dissous dans l’eau sont éliminés. La réutilisation de l’eau, quant à elle, est le processus de conversion des eaux usées municipales ou industrielles en eau qui peut être réutilisée à des diverses fins, de la réutilisation agricole à la réutilisation directe en eau potable (Direct Potable Reuse DPR).
Aujourd’hui, plus d’un demi-milliard de personnes reçoivent leur eau potable quotidienne par le biais du dessalement, notamment au Moyen-Orient, en Chine et en Inde, car la réglementation l’autorise.
Ces deux alternatives ont atteint une pleine maturité technologique au fil des années : le dessalement est désormais réalisé par osmose inverse et la réutilisation par des membranes très performantes, permettant d’obtenir une eau de la plus haute pureté possible.
Le dessalement de l’eau de mer est principalement utilisé pour produire de l’eau douce potable, et aujourd’hui, plus d’un demi-milliard de personnes reçoivent leur eau potable quotidienne par le biais du dessalement, notamment au Moyen-Orient, en Chine et en Inde, car la réglementation l’autorise. En revanche, en Europe, la législation n’autorisent pas la réutilisation directe en eau potable, car elles ne sont pas encore convaincues de son innocuité. L’eau réutilisée est donc principalement utilisée pour l’irrigation des paysages et les utilisations urbaines ou industrielles.
Quels sont les freins au développement de ces solutions contre le stress hydrique ?
L’impact environnemental du dessalement de l’eau de mer
Le dessalement est de plus en plus perçu comme trop énergivore et son impact environnemental peut être discuté.
Pour séparer l’eau et le sel, il faut rompre la liaison entre les deux composants, la consommation d’énergie associée peut alors être jusqu’à 20 fois supérieure à celle d’autres approches conventionnelles. En outre, le sous-produit généré par le processus est la saumure (de l’eau ultra-salée), et cette dernière est produite en grande quantité, car le processus offre un rendement de 50 %, ce qui signifie que 1000 litres d’eau de mer produiront 500 litres d’eau propre et 500 litres de saumure. Cette saumure est quant à elle rejetée dans l’océan et pourrait, en grande quantité, endommager l’écosystème marin en coulant au fond de la mer, car elle est de fait plus lourde que l’eau de mer« naturelle ».
La réutilisation des eaux usées souffre d’un problème d’acceptation sociale
Bien qu’il n’existe pas d’études épidémiologiques solides montrant que le recyclage des eaux usées peut provoquer une épidémie, la transmission potentielle d’infections par des organismes pathogènes, ou la libération de contaminants, restent les principales préoccupations du public concernant la réutilisation directe de l’eau potable. Cette réserve ralentit le développement de cette alternative, même si des dizaines d’installations de DPR produisent déjà une eau potable de haute qualité tout en respectant des normes sanitaires très élevées. Par exemple, l’usine de Goreangab en Namibie, ouverte depuis 1968 enregistreune capacité totale de 7,5 millilitres d’eau par jour depuis 1997, elle est donc un exemple de réutilisation directe de l’eau potable à long terme et à grande échelle.
Une évolution est cependant à venir : les réglementations régissant la réutilisation de l’eau sont de plus en plus développées, tant pour la réutilisation directe qu’indirecte. Par exemple, en Europe, la révision de la directive européenne sur le traitement des eaux usées urbaines, prévue en 2022, rendra obligatoire, dans chaque pays, l’examen systématique et un pourcentage minimum de réutilisation des eaux usées (DPR). Cette directive n’est pas encore centrée sur le DPR, mais elle représente un premier pas pour encourager son acceptation.
Ainsi, si la réutilisation de l’eau était au départ dans l’ombre du dessalement de l’eau de mer, son marché a connu une croissance plus rapide au cours des dernières décennies, avec une augmentation de 91% de la capacité de réutilisation de l’eau contre 63% pour le dessalement. En 2016, les capacités annuelles totales sous contrat des usines de réutilisation étaient déjà deux fois supérieures à celles du dessalement, avec une capacité de 2,5 milliards de m3 par an contre 1 milliard.
Le développement de ces alternatives nécessite un investissement financier important
Une autre difficulté pour déployer les deux technologies à l’échelle mondiale est leur coût, en particulier en ce qui concerne le transport de l’eau : les usines de dessalement sont toutes situées près de la mer ou de l’océan et le coût d’investissement pour construire un réseau d’eau afin d’approvisionner une zone aride éloignée de la mer est très élevé. Le même problème s’applique à une usine de réutilisation de l’eau si elle n’est pas située près de son site de traitement des eaux usées. Ainsi, c’est le segment industriel pour la réutilisation de l’eau est en augmentation, car les eaux usées produites sur site peuvent être réutilisées directement sur site. Pour illustrer, une eau réutilisée doit être distribuée dans un rayon de 5 km de sa production pour être rentable.
Le dessalement de l’eau de mer et la réutilisation des eaux usées sont bien des alternatives pour lutter contre la pénurie d’eau, mais elles doivent être utilisées localement, en quantité modérée et en combinaison avec d’autres alternatives.
On peut faire valoir que l’alternative la moins chère et la moins consommatrice au dessalement et à la réutilisation est la conservation de l’eau, , mais à plus long terme, avec les taux prévus de croissance de la population mondiale combinés aux impacts anticipés du changement climatique, il est impossible d’éviter les solutions du côté de l’offre.
Le stress hydrique continuera d’être un moteur de développement pour des approches toujours plus durables afin de gérer les ressources mondiales en eau. Le dessalement de l’eau de mer et la réutilisation des eaux usées, utilisés ensemble, localement, dans les quantités nécessaires, sont un bon moyen de s’attaquer au problème auquel le monde entier est déjà confronté. Alcimed peut vous accompagner dans vos projets liés à ces sujets. N’hésitez pas à contacter notre équipe !
A propos de l’auteur,
Oriane, Responsable de Mission au sein de l’équipe Chimie et Matériaux d’Alcimed en France
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