Dans la lignée de la stratégie de transformation du système de santé de 2018, et concomitamment à la crise nationale des urgences, le « pacte de refondation des urgences » dévoilé en 2019 pose la création d’un « service d’accès aux soins » (SAS) : un outil visant à faciliter l’accès aux soins non-programmés [1] et à l’exercice coordonné des professionnels de santé libéraux. L’équipe Innovation et Politiques Publiques d’Alcimed en décrypte les enjeux et les clés de succès.
Les enjeux du service d’accès aux soins (SAS)
Alors du 43% des venues aux urgences pourraient être prise en charge en ville [2], deux principaux constats ont été mis en lumière à l’échelle nationale :
- Les patients sont amenés à se rendre aux urgences faute d’avoir accès à des alternatives
- Les alternatives – lorsqu’elles existent (ex : SOS Médecins, Doctolib, etc.) – sont insuffisamment coordonnées, complètes et lisibles pour les patients.
L’enjeu du service d’accès aux soins est d’offrir, grâce à une plateforme digitale et à une plateforme téléphonique de régulation, une alternative simple et lisible pour accéder rapidement et à distance à un professionnel de santé. Le SAS a vocation à être accessible 24h / 24h de la même manière pour tous les Français, quel que soit leur lieu de résidence ou leur insertion dans le parcours de soins.
Pour ce faire, l’objectif est de mettre en place un service territorial et piloté de concert par les acteurs hospitaliers des SAMU et les professionnels de santé libéraux des communautés professionnelles territoriales de santé (CPTS) [3], en lien étroit avec les services de secours.
Depuis novembre 2020, 22 territoires pilotes mettent en place, à titre d’expérimentation, le SAS, couvrant ainsi 40% de la population française. En nous appuyant sur notre expérience auprès de plusieurs territoires pilotes, nous vous présentons 3 recommandations, à prendre en considération par les agences régionales de santé (ARS) et l’ensemble des parties prenantes du projet lors de la généralisation des SAS en janvier 2022.
Capitaliser sur les acteurs historiques opérationnels réalisant des soins non programmés
Le service d’accès aux soins a été conçu pour s’appuyer sur les effecteurs de soins [4] déjà présents sur les territoires concernés : maisons de santé pluriprofessionnels, cabinets médicaux ou paramédicaux, centres spécialisés en soins non programmés, etc. Il s’agit donc de capitaliser sur l’offre existante en commençant par la cartographier dès le lancement du projet, en s’appuyant sur les CPTS et les collectifs de professionnels de santé sur les territoires dépourvus de CPTS.
Ensuite, sur la base de cette offre, l’enjeu est de définir un premier schéma organisationnel de la réponse aux demandes de soins non programmés, en prenant notamment en compte les spécificités géographiques de chaque territoire.
Mettre en place une organisation intégrée et coordonnée avec l’ensemble des parties prenantes du territoire
Cette étape est fondamentale afin de garantir une implication des professionnels et une conduite de projet partagée et harmonisée par les acteurs impliqués dans le service d’accès aux soins. En particulier, il s’agit de concevoir une organisation intégrée entre l’ARS, l’assurance maladie et l’union régionale des professionnels de santé (URPS), et en particulier l’union régionale des médecins libéraux.
Afin de rendre l’organisation lisible auprès des professionnels, il faut également veiller à mettre en place un plan de communication ad hoc. Encore une fois, les CPTS peuvent être les bons relais pour mener cette communication auprès des professionnels de santé tout en limitant les sollicitations, de même que les URPS.
Prévoir un déploiement réaliste et échelonné du service d’accès aux soins
Enfin, dans la mise en place du SAS, il est important de prévoir un déploiement réaliste et échelonné, notamment concernant la mobilisation des effecteurs de soins. En effet, l’identification régulière de plages dédiées aux soins non programmés, et les changements de rémunération associés, impliquent des changements organisationnels dont il ne faut pas sous-estimer l’impact en termes d’adhésion et de mise en mouvement.
En complément, les efforts de publicité sur le service d’accès aux soins auprès du grand public ont un impact significatif sur le nombre d’appels associés et par conséquent sur le dimensionnement du dispositif.
Le Service d’Accès aux Soins a vocation à être étendu au-delà des territoires expérimentateurs dans le courant de l’année 2022, et à être progressivement généralisé sur tout le territoire national. Nul doute que le déploiement du SAS changera en profondeur nos réflexes en situation d’urgence ressentie, et nul doute qu’il accompagne une transformation majeure du premier recours vers davantage de coordination entre professionnels. Vous êtes une ARS et vous conduisez une expérimentation ? Ou vous êtes sur le point de passer à la généralisation du SAS ? Alcimed est là pour vous accompagner !
[1] Les soins non programmés répondent aux besoins des patients souffrant d’un problème de santé qui ne relève pas de l’urgence vitale mais dont la prise en charge ne peut être ni anticipée ni retardée.
[2] Le Pacte de refondation des urgences, septembre 2019 (https://solidarites-sante.gouv.fr/IMG/pdf/_urgences_dp_septembre_2019.pdf ; consulté pour la dernière fois le 29/04/22).
[3] Les CPTS regroupent les professionnels d’un même territoire qui souhaitent s’organiser – à leur initiative – autour d’un projet de santé pour répondre à des problématiques communes.
[4] Les effecteurs de soins sont les structures et professionnels de santé qui réalisent les soins et les consultations : MSP, CPTS, professionnels libéraux, etc.
A propos de l’auteure,
Agnès, Responsable de Mission au sein de l’équipe Innovation et Politiques Publiques d’Alcimed en France
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