Santé Cross-sectoriel Politiques publiques

Prise en charge de l’allergie : perspectives et enjeux de santé publique

Publié le 27 mars 2024 Lecture 25 min

Les allergies sont des pathologies bien connues et acceptées dans la population. A l’arrivée du printemps, de nombreuses personnes souffrent d’épisodes allergiques dus aux pollens. Si les traitements et la prise en charge des allergies donnent l’impression que ces pathologies sont maitrisées, qu’en est-il vraiment ? Souvent catégorisées comme pratiquement en comparaison à une maladie chronique, les allergies n’en restent pas moins des pathologies pouvant être léthales. De nombreux enjeux de santé publique se cristallisent donc autour de la question, d’autant plus lorsque l’on sait que leur prévalence risque d’augmenter dans les années à venir. Dans cet article, Alcimed décrypte les enjeux de la prise en charge de l’allergie en France et dans le monde.

Qu’est-ce qu’une allergie ?

Les allergies sont des troubles du système immunitaire qui entraînent une perte de tolérance à des substances apparemment inoffensives appelées allergènes. Il existe 5 grandes typologies d’allergies : respiratoires (pollens, acariens, moisissures, poils d’animaux), alimentaires, aux antibiotiques, aux venins ou cutanées1https://www.ameli.fr/assure/sante/themes/allergie/comprendre-allergies#:~:text=Reconna%C3%AEtre%20une%20allergie&text=L’allergie%20est%20une%20hypersensibilit%C3%A9,alimentation%20ou%20les%20m%C3%A9dicaments%20notamment.

Deux conditions doivent être réunies pour qu’une allergie survienne :

  • Une prédisposition génétique,
  • Une exposition à la substance allergène.

La majorité des allergies sont causées par des anticorps, les immunoglobulines de type E (IgE). Ces dernières sont alors dites IgE-dépendantes. Chez les non allergiques, la fonction normale des IgE est de lutter contre les parasites. Ces anticorps sont couramment fabriqués par le système immunitaire circulant à l’état libre dans le sérum sanguin et sont aussi retrouvés associés à des cellules du système immunitaire. Cela explique alors la localisation des symptômes allergiques. En effet, lorsqu’un allergène se lie à des IgE associés à une de ces cellules, cette dernière est « activée ». Elle va alors relarguer des médiateurs chimiques : histamine, tryptase, leucotriènes, prostaglandines. Ces molécules sont responsables des rougeurs, sécrétions et œdèmes observés lors de la réaction allergique.

Les symptômes allergiques apparaissent très rapidement de quelques minutes à quelques heures après le contact avec l’allergène. Ils peuvent être légers (Eczéma, conjonctivite et rhinite), modérés (démangeaison et asthme) ou graves (asthme sévère et choc anaphylactique). Dans certains cas, ils peuvent même entrainer la mort.

Comment sont traitées les pathologies allergiques ?

Le délai moyen entre l’apparition des premiers symptômes et le traitement d’une allergie est de 7 ans en France. Ce délai est lié à l’automédication fréquente et/ou à l’absence de redirection vers un spécialiste allergologue capable de traiter les symptômes et la cause de l’allergie. En effet, certains médicaments « symptomatiques » traitent les symptômes de maladie sans en traiter directement la cause, sont disponibles sans prescription chez le pharmacien, et rendent les phénomènes d’automédication et d’absence de consultation fréquents. Ce sont par exemple les antihistaminiques et les corticoïdes.

Il existe également des traitements dits « curatifs » qui sont employés lorsque les traitements symptomatiques ne suffisent plus à maitriser l’allergie. Ceux-ci sont prescrits par un médecin spécialiste en allergologie et sont accessibles dès l’âge de 5 ans. Ces traitements correspondent à des immunothérapies ou « désensibilisations » qui consistent à attribuer progressivement et par petite dose des extraits d’allergènes afin de rendre la personne tolérante à la substance administrée. L’immunothérapie nécessite obligatoirement un test IgE afin de caractériser précisément l’allergie du patient. Selon les résultats du bilan allergologique, le traitement est administré par injection sous-cutanée, sous contrôle médical, ou par prise sublinguale. La prise sublinguale (APSI ou comprimés) est la plus souvent recommandée car il s’agit de la méthode la plus sûre tout en étant la seule méthode à être remboursée.

Quels sont les enjeux de la prise en charge de l’allergie en France et dans le monde ?

Enjeu n° 1 : Améliorer le dépistage et le suivi dans les zones à faible densité médicale

Les allergies sont des pathologies dont la prise en charge est maitrisée à partir du moment où le parcours patient est respecté. En revanche, à partir du moment où le dépistage et le suivi sont mal effectués, les complications les plus graves peuvent faire des allergies un véritable problème de santé publique.

En effet, en France, dans certaines zones en sous densité médicale, comme les territoires ultramarins, l’absence de professionnels de santé entraine une prise en charge moins efficace des allergies. Ainsi, on peut observer une forte prévalence de l’asthme sévère (22% chez l’enfant et 9% chez l’adulte en Martinique contre 11% et 7% en moyenne en France) du fait d’une arrivée tardive dans le parcours de soins2https://www.madininair.fr/Asthme-allergies-et-si-c-etait-l-air-de-ma-maison-une-campagne-de. L’allergie peut alors être considérée comme un véritable problème de santé publique avec notamment deux fois plus de décès liés à cette pathologie en Martinique qu’en métropole.


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Enjeu n° 2 : Gérer et prévenir l’augmentation de la prévalence des allergies

Cette problématique autour de la prise en charge des allergies risque de s’accentuer dans les années à venir. L’allergie est d’ores et déjà considérée par l’OMS comme la 4ème maladie dans le monde après le cancer, les pathologies cardiovasculaires et le sida. Un bilan qui tend à augmenter puisqu’en 2050, la moitié de la population mondiale sera allergique. En 2010, cela ne représentait que 30% de la population contre 2 à 3% dans les années 703https://asthme-allergies.org/faits-chiffres-comprendre-lallergie/#_ftn1. Selon Hans Oettgen du département d’allergologie de l’Hôpital pour enfants de Boston, cette évolution ne peut pas être expliquée par des mécanismes génétiques du fait d’un changement bien trop rapide observable dans la population. En revanche, plusieurs autres hypothèses tendent à expliquer cette augmentation du pourcentage de la population allergique comme :

  • L’augmentation de l’hygiène qui limite l’exposition aux microbes et ne permet pas d’entrainer notre système immunitaire à réagir correctement lorsqu’il se trouve en présence d’allergènes.
  • La détérioration de la qualité de l’environnement et notamment la pollution qui peut potentialiser l’impact de certains allergènes tout en aggravant les symptômes de rhinite allergique.

L’allergie étant une pathologie dont la prévalence augmente, la complexité d’accès aux soins dans certaines régions et le nombre de cas de complication en asthme sévère risque de s’accentuer. Il est donc essentiel pour les politiques publiques de se saisir du sujet afin de construire des plans cohérents en lien avec les politiques territoriales de santé. Notre équipe spécialisée en santé se tient à vos côtés pour relever les défis liés à la prise en charge des allergies. N’hésitez pas à contacter notre équipe !


A propos de l’auteur,

Mathieu, Consultant au sein de l’équipe Innovation et Politiques Publiques d’Alcimed en France

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