Réutiliser le lanceur, une nouvelle façon d’optimiser les coûts
Pour tous les satellites, le lancement représente un poids non négligeable pouvant atteindre près d’un tiers du coût global en utilisant Ariane5 par exemple. Ainsi, réduire les coûts de lancement apparait comme un levier de compétitivité majeur, surtout pour les microsats, dont le modèle est proche du « satellite jetable ».
SpaceX s’est positionné en pionnier du réutilisable (ou « re-use ») en récupérant en 2016 le premier étage de son Falcon 9 et vise ainsi une réduction de 30% des coûts traditionnels de lancement. Cependant, la preuve de la compétitivité économique du redécollage de la fusée, du fait des moteurs endommagés par le premier vol, reste à faire.
« Le re-use des lanceurs vise essentiellement les satellites traditionnels, à haute valeur ajoutée. Pour les microsats, la problématique est quelque peu différente car les composants ne sont pas voués à durer et le challenge sera plutôt de pouvoir trouver des solutions pour lancer davantage de satellites de façon plus régulière. », précise Christelle Marestang, Responsable de Missions chez ALCIMED au bureau de Toulouse.
L’explosion du marché des microsatellites, une opportunité pour de nouveaux entrant sur le marché des lanceurs
Les microsats représentent une formidable opportunité technologique pour les opérateurs qui se lancent à la conquête de la connectivité haut-débit, notamment à destination des compagnies aériennes qui font face à une demande pressante des usagers. Certains acteurs attendent sur ce segment de la connectivité à bord une croissance de 15% par an. [1]
Pour se positionner sur ce marché requérant l’immédiateté des services (jeux en ligne par exemple), la solution est d’utiliser plusieurs petits satellites placés en orbite basse. Ces nouvelles constellations permettent, grâce à la réduction du temps de latence, d’atteindre des performances proches de celles de la fibre tout en restant compétitif d’un point de vue économique.
Avec l’explosion du nombre de ces petits satellites à bas coût attendue pour les prochaines années (voir encadré), les besoins évoluent, en plus de la réduction des coûts, vers une augmentation de la cadence des lancements.
A mini-satellites, mini-lanceurs. Certains l’ont bien compris et ont choisi de s’attaquer à ce nouveau marché, au détriment des acteurs traditionnels, avec des lancements prévus pour certains dès 2018. Le marché est en pleine mutation et parmi ces nouveaux acteurs, inspirés du succès de SpaceX, on note Vector Space, Rocket Lab, Firefly ainsi que les projets de lanceurs depuis avions comme Vulcan aerospace ou Virgin galactic.
N.B.: Le marché en plein boom des mini-satellites: D’ici à 2022, plus de 400 lancements de nanosats (<10kg) et microsats (<100-150 kg) sont attendus chaque année selon SpaceWorks Enterprises. Ce marché en pleine croissance devrait atteindre une valeur de 22 Md$ en 2025 dont 5,3Md$ pour les seuls services de lancement.
Aller plus loin en maximisant la durée de vie des satellites en opération
Pour les acteurs historiques du satellite, dans un environnement devenu beaucoup plus concurrentiel, un facteur clé de réussite est la compétitivité. Inspirés par SpaceX, qui a introduit la possibilité de réduire les coûts globaux en réutilisant les équipements les plus coûteux, la tendance est à la rentabilisation maximale des équipements. Après les lanceurs, c’est au tour des satellites eux même d’entrer dans l’aire du « re-use » : demain des services en orbite d’extension de vie aux opérateurs de satellites seront proposés grâce à des satellites « supports ». En effet, on considère que la durée de vie maximale d’un satellite varie de 5 à 15 ans selon le type de fonctions remplies (télécommunication, observation, etc). Seulement, le maintien du satellite en opération peut être limité par la quantité de carburant disponible. Que ce soit pour de la maintenance ou de l’ajout de carburant, l’objectif clé reste de maximiser la durée d’exploitation et donc les revenus générés par le satellite.
Côté Européen, Airbus Defence and Space s’est d’ores et déjà positionné sur ces « space tugs », tout comme Orbital ATK et Space Systems Loral (en partenariat avec la DARPA) aux Etats Unis. Un accord stratégique entre Intelsat et Orbital ATK [2] a été signé pour la fourniture de son nouveau service d’extension de vie annoncé en 2018.
Le secteur du spatial est aujourd’hui en pleine mutation avec l’arrivée de nouveaux acteurs et de nouveaux concepts. Généraliser l’extension de vie à tous les satellites pourrait contribuer à la résolution d’une autre problématique majeure : limiter la quantité de débris spatiaux (en 2017, près de 100,000 déchets de 1cm à 1m de diamètre gravitent autour de la Terre [3] ).
[1] En particulier Thalès pour les 75 compagnies équipées (source : www.lefigaro.fr, Bientôt de l’internet haut débit dans les avions)
[2] Pioneers in space Orbital ATK announces Intelsat as anchor customer for new satellite life extension service
[3] Les déchets sont aussi un problème dans l’espace, Sciences et Avenir Avril 2017