Santé Agroalimentaire Cross-sectoriel

La Peste Porcine Africaine et la Grippe Aviaire : les prochaines menaces virales ?

Publié le 09 octobre 2020 Lecture 25 min

L’actualité des derniers mois a été dominée à l’échelle mondiale par la pandémie de COVID-19 et ses conséquences sanitaires et économiques. Cependant, la COVID-19 n’est pas la seule maladie actuellement en pleine expansion qui pourrait avoir des répercussions sur l’économie mondiale.  Depuis 2019, de plus en plus de porcs et sangliers sont touchés par la Peste Porcine Africaine (PPA). De même, la Grippe Aviaire a fait sa réapparition et touche de nombreux oiseaux. Ces deux maladies pourraient avoir des conséquences économiques importantes sur le marché des viandes porcines et de la volaille, mais également de manière plus large sur le marché des protéines animales ! Notre équipe fait le point sur ces prochaines menaces virales.

La Peste Porcine Africaine (PPA), une maladie contagieuse mettant en péril le cheptel porcin mondial

La Peste Porcine Africaine, ou PPA, est une maladie virale qui touche les porcs domestiques et les sangliers mais qui ne se transmet pas à l’Homme. Les symptômes principaux de cette maladie sont une forte fièvre, une perte d’appétit et un rougissement de la peau, notamment au niveau des oreilles. Les souches les plus virulentes du virus entraînent la mort de l’individu en 2 à 10 jours avec un taux de mortalité frôlant les 100%. La maladie existe aussi sous des formes moins sévères avec 30 à 70% de mortalité selon les souches du virus.

La PPA est très contagieuse. Plusieurs modes de transmission existent :

– Via un contact entre muqueuses ou écorchures, ou indirectement via les sécrétions des animaux (excréments, urines, sperme, sang)
– Par ingestion d’aliments contaminés par le virus (morceaux de viandes pas ou mal cuits)
– D’individu à individu par du matériel contaminé (seringues, bottes, vêtements, véhicules, etc…)
– Par les tiques

Le virus est par ailleurs très résistant à la congélation, au froid, mais aussi à la chaleur (jusqu’à 56°C !) ce qui explique sa présence dans des aliments peu cuits tel que peut parfois l’être la viande. Il est sensible à quelques détergents, à l’éther, au chloroforme ou à l’hydroxyde de sodium, mais une fois qu’un lieu est contaminé par le virus, il est difficile de s’en débarrasser. A ce jour, il n’existe pas de vaccin approuvé contre la Peste Porcine Africaine, mais la Société Américaine de Microbiologie a annoncé en début d’année 2020 dans son Journal of Virology le développement d’un vaccin qui semble porter ses fruits, même si des essais sont encore nécessaires avant une éventuelle commercialisation. En mars dernier, une publication de l’Institut Chinois de Recherches Vétérinaires a également indiqué qu’un vaccin efficace avait été développé, mais les essais cliniques n’ont pas encore été initiés.

C’est en Afrique que la maladie a été décrite pour la première fois. Si quelques contaminations par la PPA ont été notées en Europe et en Amérique dans les années 1990, c’est en 2007 qu’elle refait une apparition massive en Géorgie, avant de se répandre dans les versants caucasiens russes. En 2014, on note les premiers cas en Pologne, et en 2018 la Chine est touchée. La maladie progresse d’environ 350km par an, ce qui en fait aujourd’hui une menace mondiale.

La situation actuelle en Chine est compliquée : on estime que la maladie a décimé 40% de la population porcine chinoise en 2019. Début 2020, le virus était encore loin d’être éradiqué.

La recrudescence de la Grippe Aviaire, une menace pour les populations mondiales d’oiseaux sauvages et domestiques

Parallèlement à la PPA, la Grippe Aviaire fait son retour. Ce virus touche les oiseaux sauvages comme domestiques. Il existe sous un grand nombre de formes, certaines plus dangereuses que d’autres pour les individus touchés. L’infection virale peut être asymptomatique ou entraîner des symptômes peu spécifiques comme des troubles du comportement (sous-alimentation, frilosité…) et des troubles respiratoires. Certaines souches du virus peuvent contaminer l’Homme, comme c’est le cas par exemple de la souche H1N1 à l’origine de la pandémie mondiale de grippe A de 2009 à 2010.

Début 2020, la souche H5N1 a été détectée dans la province de Hunan en Chine dans une ferme de 7 850 poules, dont 4 500 sont mortes à cause du virus. Pour éviter sa propagation, 18 000 volailles ont été abattues suite à la découverte de ce foyer.

En Asie, en février 2020, 37 foyers étaient encore dénombrés. De nombreux foyers apparaissent en Europe et le virus, initialement détecté en Pologne, se déplace vers l’ouest. Début février 2020, le H5N8 a notamment été détecté dans une basse-cour dans le sud-ouest de l’Allemagne, à 100km de la France. La mortalité constatée chez les volatiles était alors de 80%.

Si l’origine des différentes souches du virus, le taux de contagiosité et les risques pour l’homme ne sont pas encore bien appréhendés, les autorités vétérinaires ont sommé les pays touchés de redoubler les contrôles pour éviter des situations d’abattage de masse.

Deux virus aux conséquences économiques importantes

L’abattage de masse des animaux infectés ou suspectés d’être porteurs de virus a des conséquences économiques à l’échelle mondiale. La Chine, qui est le plus gros consommateur au monde de viande de porc, a augmenté ses importations de viande de 63% en 2019 pour compenser la baisse de production liée à la Peste Porcine Africaine. Ce creux de production a donc des répercussions sur les flux de viande de porc, mais aussi de viande de volaille et de bœuf à l’échelle mondiale.

Cette augmentation de demande en viande de la part de la Chine a pour conséquence directe l’augmentation générale des prix. Ainsi, les prix de la viande ont en moyenne augmenté de 40% en Chine en 2019, de 23% en France, de 37% en Allemagne et de 31% en moyenne dans l’UE entre le 1er janvier et les 3 juin 2019.

Les pays producteurs de viande (Brésil, pays d’Europe de l’Est) ont aujourd’hui des difficultés à répondre à la demande. On comprend alors pourquoi le fait que la Peste Porcine Africaine soit aux portes de l’Allemagne, le plus grand producteur européen de viande porcine, inquiète les marchés.

Par ailleurs, si la propagation de la grippe aviaire entraine des abattages en masse de volailles, les prix des protéines animales n’ont pas fini de s’envoler. Cela posera ensuite le problème d’accès à ces protéines, notamment dans les pays où les populations n’ont déjà pas les moyens de s’acheter les quantités journalières nécessaires. D’autres répercussions indirectes sont alors à prévoir sur le prix des protéines végétales, mais également sur le marché des aliments de substitution aux produits d’origine animale et sur l’évolution des habitudes alimentaires.

 A propos des auteurs :

Amélie, Consultante dans l’équipe Life Sciences d’Alcimed en France
Alice, Responsable de Mission dans l’équipe Life Sciences d’Alcimed en France

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