L’engouement suscité par la cosmétique halal se confirme. Depuis plusieurs années la demande s’accroit pour ce marché initialement de niche avec des projections de l’ordre de 50 milliards de dollars d’ici 2025 selon un récent rapport de Grand View Research. Le marché est actuellement porté par l’essor de la demande en Asie (TCAC pour la région Asie-Pacifique estimé à 12,6% sur la période 2014-2025 selon ce même rapport), notamment en Indonésie et en Malaisie et gagne désormais le sous-continent indien, l’Afrique et le Moyen-Orient. La cosmétique halal s’accompagne de nouveaux enjeux à la fois techniques et technologiques mais pose également de nouveaux défis aux marques notamment en termes de marketing et d’accès au marché.
La cosmétique halal : des enjeux techniques et technologiques
Un cosmétique halal ne contient ni alcool, ni ingrédient provenant d’animaux interdits aux musulmans (par exemple le porc et tous ses dérivés et sous-produits, les animaux carnivores, les charognards, les oiseaux de proies, les reptiles, les insectes, etc.) ou qui ne sont pas abattus selon la loi islamique. Bien que certains ingrédients puissent poser problèmes tels que les agents colorants dérivés d’insectes, le collagène, l’élastine ou l’acide hyaluronique d’origine animale, il existe un certain nombre d’alternatives à ces ingrédients telles que celles utilisées dans les cosmétiques végan. Une formulation sans alcool se révèle quant à elle plus délicate pour la confection de certains produits comme les parfums ou plus récemment des gels hydroalcooliques dont l’utilisation pendant la pandémie a suscité des vifs débats dans des pays comme la Malaisie. Au-delà d’une simple liste d’ingrédients prohibés, la définition d’un cosmétique halal se veut plus large et comprend également l’ensemble des produits développés afin de répondre aux besoins particuliers des femmes musulmanes.
Ainsi des innovations produits répondant aux besoins spécifiques des femmes musulmanes ont émergé sur le marché, à l’image du vernis à ongle perméable qui permet aux musulmanes de ne pas avoir à retirer leur vernis pendant les ablutions (le vernis O2M d’Inglot, le vernis H de BCI …), des gammes de shampoing spécifiquement formulées pour des cheveux couverts en permanence et donc potentiellement abimés par les frottements et le manque d’aération (Sunsilk Hijab d’Unilever ou Shayla de Safi) ou encore des crèmes hydratantes absorbées rapidement par la peau pour les femmes musulmanes portant le hijab (Pureline Hijab Fresh d’Unilever).
Au-delà de la formulation, c’est toute la chaine de valeur qui se doit de respecter les prérequis halal, des matières premières à la ligne de production en passant par la R&D, le packaging, le stockage, le transport, la distribution… Ainsi la certification halal requiert un processus de fabrication strict et propre. A titre d’exemple il existe des procédures de nettoyages spécifiques pour les lignes de production Halal et l’utilisation de ligne de remplacement est interdite. De plus, la traçabilité et la sécurité sont de la plus haute importance et les cosmétiques ne doivent pas être testés sur des animaux pour être considérés comme halal.
La cosmétique halal : des enjeux marchés et marketing
Le segment des cosmétiques halal est principalement exploité par des marques niches locales 100% halal comme Khadija Cosmetics et Hasna Cosmetics en France ou Wardah en Indonésie vendant leurs produits essentiellement en ligne. Néanmoins les multinationales commencent à se positionner sur ce segment et proposent désormais des ingrédients ou produits cosmétiques certifiés halal à l’image de BASF, L’Oréal, Croda, Unilever. Dans certains pays, le marketing de ces types de produits peut se heurter à des freins sociaux et politiques en soulevant certaines questions en lien avec la laïcité ou le communautarisme. De nouveaux enjeux légaux voient le jour. Par exemple en Indonésie, tous les produits cosmétiques internationaux qui n’ont pas été certifiés en Indonésie ou par une agence accréditée seront considérés comme non halal. Les producteurs de produits cosmétiques ont ainsi jusqu’en 2026 pour se conformer à la loi halal de 2014 du gouvernement indonésien, entrée en vigueur en 2019.
D’un point de vue accès au marché, une très bonne connaissance du marché cible est essentiel car il existe des différences notoires entre les pays, notamment concernant les procédures de certification. En effet, avec une soixantaine d’organismes certificateurs au niveau mondial, il s’avère compliqué d’obtenir un certificat reconnu dans plusieurs pays avec un manque de reconnaissance avéré entre les différents organismes. Certains pays comme la Turquie ou l’Iran ont d’ailleurs mis en place des systèmes de certification étatiques. D’autres spécificités « pays » sont à prendre en compte, notamment quant à la définition d’un cosmétique halal. Par exemple, le seuil d’acceptation de l’alcool dans les cosmétiques varie selon les pays. Si l’alcool est formellement interdit en Arabie Saoudite ou en Iran, un résidu de 0,5% est acceptable en Malaisie et de 1% en Indonésie et à Dubaï.
La cosmétique halal poursuivant sa croissance, les clientes de confession musulmane ont désormais accès à une offre plus inclusive. Si l’accélération des tendances de consommation modernes telles que la sécurité, la transparence ou la clean beauty pourrait indirectement encourager la croissance de ce segment, la notion d’accès au marché est clé pour pouvoir se positionner et développer une offre sur ce segment. Vous portez un projet et ce sujet vous intéresse ? Alcimed peut vous accompagner dans la diversification de votre offre et votre stratégie de market access.
A propos de l’auteur
Aliénor, Consultante Senior dans l’équipe Cosmétique & Luxe en France