1. L’édition génomique : un défi technologique
La technologie la plus utilisée en matière d’édition de génome repose aujourd’hui majoritairement sur la technologie de CRISPR/Cas9 (Clustered Regularly Interspaced Short Palindromic Repeats / CRISPR-associated protein 9). Son efficacité, sa précision de ciblage supérieure et son faible coût en font une technique particulièrement prometteuse. Cependant, la maîtrise de ce type de technologie n’est pas encore aujourd’hui complètement acquise à jour, et quelques contraintes scientifiques majeures doivent encore être surmontées :
- Les effets hors cible, qui correspondent à une ou des modifications involontaires sur des sites du génome autres que celui prévu, là où toute modification non souhaitée pourrait entrainer des conséquences non voulues sur l’organisme vivant ;
- La traçabilité des techniques d’édition de génome, qui est aujourd’hui peu développée et qui pourrait causer de futurs problèmes comme le suivi de l’origine de produits d’animaux génétiquement modifiés destinés à l’alimentation ;
- La complexité de manipulation de la technique, déjà contraignante dans sa mise en œuvre à l’échelle des laboratoires et des projets académiques, au milieu de l’élevage, représente aujourd’hui un obstacle majeur pour transposer la technologie d’édition génomique, déjà contraignante dans sa mise en œuvre à l’échelle des laboratoires et des projets académiques, au milieu de l’élevage.
Néanmoins, l’évolution actuelle des stratégies d’innovation autour des connaissances de la génomique et du progrès génétique entrainent l’apparition de solutions qui pourraient permettre de relever ces différents défis technologiques et scientifiques. A titre d’exemple, l’introduction des constructions de CRISPR/Cas9 peut être simplifiée par des techniques comme l’électroporation de zygotes, la transduction de zygotes avec le virus adéno-associé recombinant (rAAV), ou encore la technologie des géniteurs de substitution.
Il existe donc un fort enjeu de veille autour des nombreux progrès technologiques effectués et du développement de stratégies d’innovation autour des techniques d’édition de génome.
2. Le feu vert des autorités réglementaires pour l’édition génomique d’élevage : une étape clé
Aujourd’hui, les outils d’édition génomique et surtout les animaux génétiquement modifiés sont encore très régulés par les autorités réglementaires, notamment en raison du manque de recul et de connaissance de la technologie. En Europe par exemple, les animaux génétiquement modifiés sont considérés comme des OGM (Organismes Génétiquement Modifiés), et sont donc strictement interdits à la commercialisation. Aux Etats-Unis, les altérations intentionnelles de l’ADN génomique sont réglementées en tant que médicament vétérinaire pour les animaux destinés à l’alimentation depuis 2009 par la FDA (Food and Drug Administration), rendant complexe la mise sur le marché d’animaux génétiquement modifiés.
Cependant, il existe à ce jour des cas particuliers d’animaux génétiquement modifiés étant autorisés à la commercialisation. C’est par exemple le cas du saumon AquAdvantage de l’entreprise AquaBounty Technologies, un saumon atlantique transgénique qui atteint plus rapidement sa maturité et sa taille adulte, et qui est commercialisé au Canada et aux Etats-Unis.
Un autre exemple est celui d’un porc transgénique résistant au PRRSv (virus du syndrome dysgénésique et respiratoire), développé par l’entreprise Genus PIC, et qui est aujourd’hui soumis à une procédure d’évaluation par la FDA.
On peut également observer une évolution dans le positionnement de certaines autorités réglementaires vis-à-vis de la réglementation des animaux génétiquement modifiés. C’est non seulement le cas de la FDA avec l’évaluation du porc transgénique de Genus, mais aussi de l’Argentine qui a été le premier pays à publier sa proposition d’approche de la réglementation des organismes génétiquement modifiés. En Europe, la Norvège a créé le « Conseil consultatif norvégien sur les biotechnologies », qui a publié une « Proposition d’assouplissement de la réglementation de l’UE sur la dissémination volontaire d’organismes génétiquement modifiés (OGM) ».
Ces évolutions au niveau réglementaire pourraient bien faciliter l’apparition et le développement dans les années à venir de nouvelles stratégies d’innovation et de nouveaux projets autour de l’édition génomique et d’organismes génétiquement modifiés, notamment pour le monde l’élevage.
3. L’édition génomique dans l’élevage : à la rencontre des attentes sociétales
Il existe encore aujourd’hui des inquiétudes sociétales vis-à-vis de l’édition génomique, comme cela a été le cas il y a une dizaine d’années avec le scandale sur le développement de maïs OGM. L’édition de génome est en effet à l’origine de nombreuses controverses et débats autour de plusieurs axes, tels que les questions d’ordre scientifique (risques sanitaires et environnementaux), d’ordre éthique (modification du vivant) ou encore d’ordre agroéconomique (brevet sur le vivant, monopoles).
Néanmoins, certaines applications de l’édition génomique dans le milieu de l’élevage pourraient venir résoudre des enjeux pour lesquels il n’existe à ce jour pas de solution satisfaisante, comme par exemple le PRRSv (virus du syndrome dysgénésique et respiratoire du porc) qui ne dispose d’aucune solution thérapeutique ou vaccin efficace, et qui explique le développement par l’entreprise Genus PIC d’un porc transgénique résistant à cette maladie.
On observe également un intérêt croissant des attentes sociétales pour des problématiques du milieu de l’élevage telles que le bien-être animal, l’impact environnemental ou encore la santé animale. Le défi pour la technologie d’édition de génome sera donc d’acquérir cette acceptation sociétale grâce aux solutions que cette technologie pourra apporter aux grands enjeux du monde l’élevage.
La technologie de l’édition de génome pourrait bien transformer les pratiques d’élevage et l’approche de la santé et du bien-être animal au cours des prochaines décennies, en fonction de la manière dont les entreprises, les autorités réglementaires et la société l’adopteront. Certes, l’édition de génome sur les animaux d’élevage est encore une technologie émergente, qui fait encore face à des enjeux majeurs pour son développement, mais celle-ci arrive progressivement à maturité pour la commercialisation et semble prometteuse pour répondre aux grandes problématiques d’élevage. Des entreprises font évoluer leurs stratégies d’innovation en prenant le pari que cette technologie va se développer et en commençant à se positionner dans ce domaine. C’est le cas de sociétés comme AquaBounty Technologies ou de grandes entreprises d’insémination comme Genus PIC qui se positionnent déjà sur le sujet. Alcimed suit de près les rapides évolutions des stratégies d’innovation des entreprises dans ce domaine, et est prêt à vous accompagner pour vous aider à surmonter les défis sur ces sujets.
A propos de l’auteur,
Nicolas, Consultant dans l’équipe Sciences de la Vie d’Alcimed en France