L’œil : un organe cible idéal pour la thérapie génique
Les troubles conduisant à la cécité ne sont pas le seul type de maladies héréditaires. Pourquoi la thérapie génique est-elle un sujet majeur dans l’œil par rapport à d’autres organes ? La raison est que l’œil présente un environnement extrêmement propice aux examens et à la mise en œuvre de thérapies.
Tout d’abord, l’œil est un organe facilement accessible. L’examen et la chirurgie sont facilités car les interventions peuvent se faire de l’extérieur, sans processus invasif. Ensuite, il est important de suivre la progression de la maladie et l’efficacité du traitement. Par exemple, les cliniciens peuvent observer le phénotype de l’œil et visualiser le fond de l’œil grâce à l’imagerie rétinienne.
Deuxièmement, l’accessibilité de l’œil est également pratique pour l’administration du traitement. Habituellement, une aiguille est insérée à l’intérieur de l’œil. Bien que cette opération soit invasive, elle est réalisée sans affecter d’autres parties du corps.
Troisièmement, l’œil est également un site immunitaire privilégié protégé par la barrière hémato-rétinienne. Cela signifie qu’il peut tolérer l’introduction d’antigènes sans déclencher de réponse immunitaire inflammatoire.
Enfin, les cellules à l’intérieur de l’œil qui sont ciblées dans les thérapies ne se divisent pas. Le traitement dure donc toute la vie.
L’approche génétique : un défi scientifique, clinique et commercial
L’idée d’origine est de fournir un traitement agissant au niveau génétique pour corriger les altérations causées par les mutations de l’ADN de l’œil. Le développement d’une thérapie génique pour traiter la cécité est un défi pour la science, dans les cliniques et pour le business.
Combattre la cécité : un défi scientifique
Le défi scientifique consiste à trouver la stratégie appropriée pour corriger la mutation d’un gène spécifique. Ainsi, environ 270 gènes sont à l’origine de troubles rétiniens héréditaires, tels que RPE65, CEP290 ou RHO qui sont des gènes étudiés dans le cadre d’essais cliniques. Chacun d’entre eux est altéré d’une manière particulière. Les mutations de perte de fonction sont particulièrement pratique et dans ce cas, une thérapie appropriée consiste à insérer une copie normale du gène pour remplacer celle qui est erronée. Cette approche est l’option la plus étudiée, mais elle présente une limite majeure : elle ne peut être utilisée que pour les petits gènes, car le véhicule permettant d’insérer le gène dans l’œil a un espace limité. La technologie d’édition de gènes CRISPR-Cas9 pourrait donc être une alternative pour corriger les mutations. Cette technologie révolutionnaire peut également être utilisée pour réguler l’expression des gènes, ce qui est nécessaire dans d’autres types de mutation.
Combattre la cécité : un défi clinique
Une fois la stratégie appropriée mise au point, la thérapie doit être injectée dans l’œil lors d’une intervention chirurgicale. Une aiguille est insérée dans l’œil pour administrer le traitement, ce qui est associé à au moins trois grands défis cliniques :
- Un premier défi sont les essais cliniques qui échouent à cause d’une l’inflammation. En effet, la présence d’une molécule étrangère injectée pour le traitement peut provoquer une réaction immunitaire dans l’œil.
- Un autre défi est l’apparition de la maladie à un stade précoce de la vie, ce qui rend la chirurgie difficile. Les yeux des nourrissons sont physiquement plus petits, et les enfants sont trop jeunes pour exprimer leur consentement.
- Un troisième obstacle aux essais est que plusieurs maladies progressent lentement, ce qui implique des essais à long terme.
Combattre la cécité : un défi commercial
Du côté des entreprises, le principal défi est que les gènes ne peuvent être considérés comme une propriété intellectuelle. Un gène muté dans une maladie ne peut donc pas faire l’objet d’une licence. Les entreprises concèdent en effet des licences pour des technologies, qui sont les stratégies et les techniques permettant de corriger une mutation. Par conséquent, une forte concurrence est en cours autour des différents gènes, car ils peuvent être explorés par n’importe qui.
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Les perspectives des traitements génétiques et alternatifs pour combattre la cécité et les maladies de la rétine
Le traitement génétique est un sujet convoité dans les maladies rétiniennes héréditaires. C’est la raison pour laquelle La FDA (La Food and Drug Administration) a récemment approuvé la première thérapie génique ciblant le gène RPE65 dans l’ACL par Spark Therapeutics. Les entreprises sont désormais à la recherche de nouveaux gènes et de nouveaux troubles à cibler au moyen de technologies et de stratégies innovantes.
Tout en recherchant des cibles génétiques idéales, les approches de traitement alternatifs font également partie de la concurrence. La thérapie antisens est par exemple prometteuse contre les gènes RHO dans la rétinite pigmentaire ou CEP290 dans les maladies de la rétine ACL. Cette approche agit à un niveau différent de la thérapie génique à l’intérieur de la cellule. Les oligonucléotides dits antisens influencent l’expression de l’ARN messager, le produit de la transcription d’ADN. L’objectif est toutefois similaire : réduire au silence ou moduler l’expression des protéines, le produit final d’un gène. Enfin, les approches pharmacologiques traitant la maladie à l’aide de petites molécules, les thérapies cellulaires et les implants apportent également des traitements prometteurs dans la lutte contre la cécité.
Dans la lutte contre la cécité, la thérapie génique est une biotechnologie en plein essor. L’œil présente un environnement propice grâce à ses propriétés physiques. Les troubles oculaires héréditaires sont causés par de nombreux gènes. Le premier défi consiste à trouver le bon gène avec une stratégie thérapeutique adaptée. Une fois dans les essais cliniques, les défis sont d’éviter l’inflammation de l’œil après l’administration de la thérapie, de gérer les très jeunes patients et la lente progression de la maladie. Bien qu’il existe des obstacles au cours du développement, la thérapie génique est un domaine concurrentiel en médecine oculaire. Outre la thérapie génique, les entreprises du secteur de la santé explorent également les thérapies pharmacologiques, cellulaires et les implants. Les bénéfices seront certainement élevés pour les entreprises qui réussiront. Et l’impact sur la qualité de vie des personnes aveugles sera, espérons-le, considérable.
Si votre entreprise est active dans le domaine de la thérapie génique, l’exploration de telles possibilités dans le domaine des troubles oculaires et autres pourrait être une excellente opportunité. Alcimed est là pour vous soutenir !
A propos des auteurs,
Christina, Consultante et Quentin, Responsable de Mission dans l’équipe Santé d’Alcimed en Suisse
Benjamin, Grand Explorateur Santé Digitale dans l’équipe Santé d’Alcimed en France