Dépistage du cancer du sein : la mammographie d’aujourd’hui et de demain
Le dépistage du cancer du sein est un enjeu majeur de santé publique. Avec plus de 2 millions de nouveaux cas dans le monde chaque année, le cancer du sein représente la première cause de décès par cancer chez la femme. Or, une détection précoce réduit drastiquement ses conséquences. Actuellement, le dépistage est réalisé dans la plupart des pays européens tous les 2 ans, pour toutes les femmes de 50 à 74 ans sans symptôme apparent ni facteur de risque particulier. Il est effectué avec une mammographie numérique 2D, et éventuellement une échographie. La détection d’une anomalie entraîne des examens complémentaires (ultrasons, IRM, tomosynthèse) suivis d’une biopsie, et d’une éventuelle prise en charge spécifique. Ainsi, il est crucial d’avoir des techniques de dépistage plus fiables, plus précoces et moins intrusives afin de mieux diagnostiquer les femmes et hommes (environ 1% des personnes touchées par le cancer du sein sont des hommes) et réduire l’impact du cancer du sein sur leur santé.
Au cours des dernières années, les techniques de dépistage du cancer du sein ont évolué et se sont nettement améliorées. Alcimed revient sur les dernières tendances qui visent à améliorer le diagnostic des patientes.
La tomosynthèse, début d’une nouvelle ère pour le dépistage du cancer du sein, ou innovation encore trop imparfaite ?
Plusieurs ruptures dans les techniques de dépistage du cancer du sein ont marqué ces dernières années. D’abord l’autorisation de la mammographie numérique, autorisée en 2008 dans le cadre du dépistage organisé en France, a été utilisée en complément de la mammographie analogique, puis l’a remplacée dans la plupart des pays européens. Plus récemment, la tomosynthèse a fait son apparition.
Commercialisée d’abord par Hologic en 2011, la tomosynthèse permet une imagerie « entre la 2D et la 3D ». Elle a incontestablement permis d’augmenter la détection des tumeurs. Si pour certains elle est perçue comme une grande avancée, il n’en demeure pas moins que les meilleures performances de détection des lésions ont entraîné un surdiagnostic, et un nombre accru de biopsies, ce qui limite la volonté de diffusion de ce type d’équipement. Cette technique de mammographie entraîne également une radiation plus importante (suivant les appareils), et double le temps de lecture des résultats. La généralisation de la tomosynthèse en dépistage est encore loin d’être assurée. Bien que les Etats-Unis aient recommandé son utilisation systématique en dépistage, la HAS ne l’a pas validée à ce jour.
La mammographie de demain : des technologies prometteuses dans l’amélioration du diagnostic
D’autres avancées pour améliorer le diagnostic ont vu le jour ces dernières années, comme l’angiomammographie. Cette technique associe un agent de contraste iodé à la mammographie, et présente aussi des performance diagnostiques significativement supérieures à la mammographie numérique.
Dans l’optique de rendre le diagnostic plus fiable, des travaux sont en cours et visent notamment à créer un système de mammographie 3D qui fonctionnerait par contraste de phase. Cette solution a l’avantage de ne plus nécessiter de compression du sein comme les solutions actuelles. Elle permettrait également d’avoir une vue 3D complète (tomographie), de déceler des micro-calcifications encore non détectables à ce jour, et d’augmenter largement la détection des tumeurs dans les seins denses. Les temps de développement de la solution, d’essais et de mise sur le marché étant relativement longs, ce type de solution pourrait être utilisée massivement d’ici une quinzaine d’années.
L’intelligence artificielle : un impact sur tous les aspects de la mammographie
Au-delà de l’évolution des techniques d’imagerie, l’intelligence artificielle va avoir une importance grandissante, de l’organisation même du dépistage du cancer du sein à l’analyse des résultats.
L’intelligence artificielle va très probablement impacter le dépistage du cancer du sein en permettant une évaluation personnalisée du risque de développer un cancer du sein. Des projets à l’image de MyPeBs (My Personal Breast Screening, projet international financé par Unicancer) montrent l’importance de la tendance au dépistage « à la carte ». Ce type de dépistage permettrait de mieux diagnostiquer les femmes les plus à risque. L’intervalle entre deux dépistages pourrait être déterminé en fonction de nombreux critères comme les antécédents familiaux, la structure du sein et des tissus, la densité des seins, l’âge, ou encore l’indice de masse corporelle.
En termes d’évolution du matériel de dépistage, c’est aussi et peut-être surtout au niveau du software que s’opère un grand changement. L’intelligence artificielle joue un rôle de plus en plus important dans l’aide à la lecture et à l’analyse des résultats par les médecins. Le CAD (Computer Aided Diagnosis) est déjà utilisé et promet de devenir de plus en plus efficace avec l’enrichissement des bases de données en radiomique.
L’enjeu majeur aujourd’hui est de développer des équipements plus performants, qui permettent de diminuer les faux négatifs sans augmenter les faux positifs pour éviter les biopsies inutiles. La tomosynthèse a certes permis de diminuer les faux négatifs mais entraîne toujours trop de surdiagnostic. Des projets de nouvelles techniques vont dans ce sens, et en profitant de l’apport de l’intelligence artificielle, devraient permettre une nette amélioration des diagnostics. Nous en sommes persuadés, le potentiel de ces solutions pourra permettre à terme de réduire la mortalité liée encore aujourd’hui au cancer du sein.
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A propos de l’auteur
Julia, Consultante dans l’équipe Santé d’Alcimed en France
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